Critiques et réhabilitations

Archéologues et architectes de renom s’insurgent parfois contre des choix de restauration à la cathédrale ou, au contraire, contre l’inaction face à l’urgence de conservation.

Achille Carlier, architecte et premier Grand Prix de Rome, accuse dès 1936 l’administration et Robert Gauchery de ne pas prendre les dispositions nécessaires à la dépose des vitraux. Il exprime ses craintes dans sa correspondance puis, en juin 1937, au congrès de la Fédération des sociétés savantes du centre de la France à Nevers et dans la revue L’Action française, en novembre 1938. Il encourage son ami François Guillaume à « travaille[r] pour le bien public » en démontant les vitraux sans l’aval de l’administration !

Lettre d’Achille Carlier adressée à François Guillaume, commerçant des arts de la table et érudit local, le 7 septembre 1936. L’architecte remet en cause les propos de Robert Gauchery et doute de ses actions. AD du Cher, 126 J
Lettre d’Achille Carlier adressée à François Guillaume, commerçant des arts de la table et érudit local, le 7 septembre 1936. L’architecte remet en cause les propos de Robert Gauchery et doute de ses actions. AD du Cher, 126 J

Mais les critiques les plus acerbes sont dans le Rapport sur les travaux de restauration exécutés avant 1848 publié par Octave Roger en 1889. Elles s’en prennent au maître-verrier Thévenot et aux sculpteurs Romagnesi et Caudron. La moquerie est de rigueur pour Thévenot et son dessin du pape saint Sixte, « véritable caricature : profil de crétin, tiare en bonnet de pierrot ». Le ciment de Caudron, « substance grasse et molle (…) antipathique à la pierre » est fustigé… La diffusion du rapport, présenté comme un document officiel rédigé par Adolphe-Napoléon Didron, secrétaire du Comité historique des arts et monuments, à la demande de l’administration centrale, provoque un jugement négatif des travaux pendant de nombreuses années.

Extraits du « Rapport de Didron » publié par Octave Roger dans les Mémoires de la Société des antiquaires du Centre de 1889. AD du Cher, J 209
Extraits du « Rapport de Didron » publié par Octave Roger dans les Mémoires de la Société des antiquaires du Centre de 1889. AD du Cher, J 209

Ce n’est qu’à la lumière des recherches de Karine Boulanger et du chantier de restauration des portails de 1998-2011, que ces interventions ont été réhabilitées. Le rapport original de Didron, conservé aux Archives nationales, est bien moins virulent et la copie de 1889 est probablement un faux ! La qualité du travail de Thévenot et la pérennité du ciment font aujourd’hui l’objet d’éloges, surtout pour l’époque où « la science archéologique était à ses débuts ».

Portail du Jugement dernier, ajouts au ciment romain de Caudron. Drac Centre-Val de Loire
Portail du Jugement dernier, ajouts au ciment romain de Caudron. Drac Centre-Val de Loire
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