Un chantier de 30 ans
Progressant au fur et à mesure des acquisitions des terrains traversés (expropriations et contentieux sur les indemnités engendrent de nombreux retards), 40 kilomètres de canal jusqu’à La Tranchasse sont creusés en 1820, les travaux de maçonnerie pour la plupart des ponts et écluses restent encore à réaliser. Pour des raisons pratiques et budgétaires, on utilise des matériaux locaux en priorité : pierres des carrières de La Celle-Bruère et de Meillant, la chaux de Colombiers…
Pour accélérer les travaux, et après une vaine tentative de placer le canal en régie, l’État confie le portage financier du projet à treize banquiers qui fournissent un apport de 12 millions de francs. Ils constituent la Compagnie des Quatre Canaux (de Berry, latéral de la Loire, du Nivernais, bretons) par laquelle 68 000 actions sont émises pour financer l’emprunt. Les conditions consenties par l’État sont très avantageuses, prévoyant notamment le partage pendant 40 ans des ressources du canal (produits des péages, vente du bois et foins issus des terrains du canal…).
La mise en eau du canal et son exploitation débute au fur et à mesure de l’achèvement des différentes sections : Vierzon-Bourges en 1831, Marseille-les-Aubigny-Sancoins en 1837, Montluçon-Bourges en 1838…
Pour assurer la liaison du canal de Berry avec la Loire, la rivière le Cher est canalisée à partir de 1841 par l’établissement d’écluses et de barrages amovibles entre Saint-Avertin et Noyers-sur-Cher, dont le port sert au transbordement des marchandises entre les bateaux du canal et ceux du Cher.
Le canal est considéré comme achevé en 1845, le coût de sa construction s’élève à plus de 26 millions de francs, il traverse sur 261 km et 96 écluses les trois départements du Loir-et-Cher, du Cher et de l’Allier.
Pourquoi avoir planté plus de 190 000 arbres sur les berges du canal dès sa construction ?
Les raisons sont en fait multiples : les plantations bornent l’espace du domaine du canal, elles fournissent le bois nécessaire à l’entretien des ouvrages (ponts, batardeaux). La vente du surplus des coupes apporte en outre un supplément de revenu non négligeable. Les racines des arbres renforcent également la solidité des berges ; l’ombre portée de leur feuillage, qui limite l’évaporation de l’eau, produit une fraîcheur salutaire aux haleurs et entrave la pousse des herbes aquatiques.
Plus surprenant, les arbres ont également un rôle signalétique, différentes essences (merisiers, noyers et autres fruitiers) annoncent aux bateliers écluses et ouvrages remarquables. Si la plantation de différentes essences a souvent été expérimentée selon la nature des terrains, au milieu du XIXe siècle on privilégie plutôt des arbres rustiques à croissance rapide et à feuillage abondant comme le peuplier, l’orme ou l’acacia.