Une brève histoire du notariat et de ses archives

Du XIIIe siècle à nos jours

Pays de droit coutumier, le Berry a vu se développer le notariat plus tardivement que dans le sud de la France. La première mention d’un notaire remonte à un acte de 1298.

Attachés au service de l’archevêque, d’un seigneur ou d’une juridiction, les notaires avaient pour fonction, comme aujourd’hui, de rédiger des actes et de les authentifier. Pour ce faire, ils délivraient aux parties des « grosses » ou « expéditions » et gardaient un exemplaire original signé : la « minute ». À la fin du Moyen Âge, les notaires gagnèrent en autonomie et acquirent un rôle crucial pour régler les rapports entre particuliers. Le registre de minutes le plus ancien conservé dans le Cher, daté de 1463, en témoigne.

Des textes émanant de l’autorité royale sont venus réglementer la profession de notaire, par exemple l’édit de Villers-Cotterêts qui, en 1539, organisa la conservation des minutes et prescrivit la tenue d’un répertoire. La communauté des notaires de Bourges, dotée d’armoiries, était chargée de défendre les intérêts de la profession et intervenait dans la formation des nouveaux entrants.

La Révolution française transforma les notaires en fonctionnaires, recrutés par concours. Les notaires sont nommés par arrêté du ministre de la justice. La loi du 12 mars 1803 fixa à 55 le nombre des études dans le département du Cher et instaura l’inamovibilité des titulaires. En 1816, la possibilité fut donnée de présenter un successeur à l’agrément de l’état, après accord sur un prix de vente pour l’office. Ces textes fixèrent pour longtemps le cadre d’exercice de la profession.

Ce n’est qu’en 1979 que les minutes des notaires furent reconnues comme archives publiques. La loi fit obligation de les verser aux Archives départementales, après un délai qui est passé de 100 à 75 ans en 2008, délai qui correspond à leur libre communication. Les archivistes avaient pris l’initiative d’accueillir les archives anciennes des notaires bien avant cette date. Dès 1822, les minutes centralisées par la compagnie des notaires de Bourges, qui se trouvaient au palais Jacques Cœur, rejoignirent ainsi les Archives départementales. Les dépôts et versements n’ont pas cessé depuis.

Le notaire, officier public

Autrefois, peut-être plus qu'aujourd'hui, l'ensemble de la société passait devant un notaire. Le moindre accord entre deux parties donnait lieu à la signature d'un acte authentique. Les notaires sont alors destinés à recevoir les actes de la juridiction volontaire (c’est-à-dire les actes à caractère privé) pour leur donner le caractère de l’autorité publique.

À l’origine, c’est l’apposition du sceau de la juridiction à laquelle le notaire était rattaché (royale, seigneuriale ou apostolique) suivant son ordre et devant laquelle il prêtait serment, qui conférait son authenticité à l’acte qu’il avait rédigé. À cette occasion était perçu un droit de sceau, et le notaire s’intitulait alors simplement « passeur » : celui qui « passe » l’acte. Il n’y eut plus ensuite qu’une simple mention portée sur l’acte original (la minute), indiquant que le droit était payé. La rédaction de l’acte obéissait à des règles bien établies en fonction de sa nature, et le « seing manuel » du notaire, c’est-à-dire sa signature, enregistrée auprès de la juridiction dont il dépendait, était une garantie contre les faux.

Apparu au Moyen Âge sous la forme d’un bandeau d’étoffe brodé des armes royales, le panonceau signalait dans une ville la présence de la maison d’un notaire afin que les actes qui y étaient conservés puissent être protégés en cas d’émeute ou d’incendie. Il est devenu par la suite une plaque de bois ou de métal frappée des insignes du pouvoir politique, tour à tour le lys royal (Ancien régime), l’aigle impérial (Premier et Second Empires) et la Liberté, effigie de la République. D.R.

Quelles archives notariales pour demain ?

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, plusieurs évolutions ont touché le notariat :

- La profession de notaire est ouverte aux femmes depuis 1948 mais il a fallu attendre 1982 et l’installation de Micheline Etienne à Lignières pour que ce changement devienne une réalité dans le Cher.

- En permettant aux notaires de se regrouper au sein de sociétés civiles professionnelles, la loi de 1966 a enclenché un processus de concentration qui a d’abord touché les villes de Bourges et de Vierzon avant de s’étendre au monde rural. Le nombre des études est passé de 54 à la Libération à 31 aujourd’hui. Certaines villes ne sont plus desservies que par une succursale d’une étude voisine.

Depuis 2008, la dématérialisation des actes authentique et leur signature électronique, rendue possible à distance, ne cesse de se développer. La conservation des données est pour l’heure assurée dans le minutier central électronique des notaires de France. À terme, elles devront être versées aux Archives départementales territorialement compétentes.

Les archives notariales occupent plus de 2,2 kilomètres linéaires de rayonnages et représentent près de 36 000 cotes aux Archives départementales du Cher. En salle de lecture, ce sont les sources les plus consultées par le public. La numérisation d’un tel volume de documents est hors de portée à brève échéance. Des clés d’accès aux archives notariales ont néanmoins été déjà mises en ligne ou le seront prochainement : tables de contrats de mariage du contrôle des actes et de l’enregistrement (sous-séries 2 C et 1 Q), doubles des répertoires des notaires tenus entre 1799 et 1959 pour être déposés au greffe du tribunal de grande instance de Bourges (sous-série 1 E). La numérisation des minutes a débuté en 2023 avec une priorité placée sur les actes du XVIe siècle dépouillés par les archivistes du Cher depuis la fin du XIXe siècle et tout récemment, par les chercheurs associés au Centre d’études supérieures de la Renaissance de l’université de Tours pour la base de données RENUMAR accessible via le lien ci-dessous.

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